samedi 6 août 2011

La nouvelle constitution du Maroc Nouveautés et avancées

En dehors du traitement des grands sujets de la séparation des pouvoirs, de l'indépendance de la justice, et de la gouvernance, la nouvelle Constitution est riche de plusieurs dispositions qui touchent aux fondements de notre société et à notre insertion dans le concert des pays modernes et démocratiques.

Abdeltif Menouni, l'homme qui a piloté le projet de la nouvelle constitution. / DR
Abdeltif Menouni, l'homme qui a piloté le projet de la nouvelle constitution. / DR
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Dès le préambule, la nouvelle Constitution s’affiche comme fondamentalement plus avancée que l’ancienne de 1996.

D’abord notre référentiel et nos racines sont mieux caractérisés

Le Maroc, Etat musulman souverain… son unité, forgée par la convergence de ses composantes arabo-islamique, amazighe et saharo-hassanie, s'est nourrie et enrichie de ses affluents africain, andalou, hébraïque et méditerranéen...

Il faut noter en particulier la reconnaissance officielle de nos racines amazighe et hébraïque. Peu d’états arabes sont capables encore aujourd’hui d’affirmer clairement un tel référentiel sans soulever les rejets de tous les extrémistes.

Notre objectif de réaliser l’unité africaine est remplacé par une consolidation simplifiée de nos relations avec les pays d’Afrique.

Diverses touches indiquent clairement le choix démocratique

Le choix irréversible de construire un Etat de droit démocratique basé notamment sur le respect des libertés fondamentales et la bonne gouvernance est la première déclaration de la nouvelle Constitution.

La personne du Roi n’est plus sacrée comme dans l’ancienne constitution mais elle reste inviolable et doit être respectée. Pas moins ni plus que Juan Carlos par exemple.

Le libre exercice des cultes reste garanti par l’état.

Le champs religieux islamique est défini avec précision: Aucun parti ou association ne peut utiliser la religion comme élément fondateur, et la seule autorité habilitée à prononcer des fatouas est le conseil des Oulémas présidé par le Roi.

Autres originalités spécifiées clairement: tout haut fonctionnaire doit déclarer ses biens. Tout ministre ne peut cumuler les fonctions. De même, les ministres et les élus sont justiciables comme tout citoyen et la fameuse immunité abusive qui leur était accordée n'existe plus.

Et bien entendu, la mesure tant attendue est arrivée: L'amazigh est désormais une langue officielle, au même titre que l’arabe.

Les droits fondamentaux sont très renforcés et explicités dans la nouvelle Constitution

Ainsi le droit de manifester pacifiquement est déclaré sans détours.

En cas d’arrestation, tout citoyen a le droit de garder le silence, d’être informé immédiatement des raisons de son arrestation, d’avoir un avocat et de contacter ses proches.

La dénonciation de la torture, des enlèvements, des mises au secret arbitraires est faite en les qualifiant de crimes les plus graves.

Prémisses de démocratie directe ?

Parmi les caractéristiques originales, il faut noter le droit donné aux citoyens de pouvoir s’opposer à des décisions publiques ou à des lois par le biais de pétitions.

Le travail associatif et le rôle des ONG qui étaient totalement absents de la dernière Constitution, sont aujourd’hui reconnus et renforcés.

Des dispositions qui donnent des idées

Il ne faut pas sous-estimer aussi certaines déclarations dans la nouvelle Constitution qui peuvent conduire à de nombreuses avancées démocratiques. Ainsi le débat sur la peine de mort trouve sa justification dans la déclaration suivante:

“Le droit à la vie est le droit premier de tout être humain.”

Lorsque la Constitution fait appel au bannissement de toute discrimination en raison du sexe ou de quelque circonstance personnelle que ce soit, c’est tout le débat sur les comportements sexuels qui est implicite.

Le renforcement de l'égalité homme/femme dans la société fait référence à tous ces chantiers concernant les droits d’héritage, de la moudawana, du travail en plus du champ politique. Tout pourra être discuté.

Avancées indiscutables dans la séparation des pouvoirs et l'indépendance de la justice et la bonne gouvernance

Quels que soient les avis des uns et des autres sur le fait que la nouvelle Constitution soit allée assez loin ou pas, il n’en demeure pas moins que des propositions concrètes et sérieuses sont faites en direction:

- de la séparation des pouvoirs

- de l’indépendance de la justice

- de la bonne gouvernance

Ceci est manifeste dans les nouvelles prérogatives du Chef de gouvernement, du Parlement et du conseil supérieur de la magistrature, ainsi que dans l’éclatement de l’ancien article 19 en deux parties, l'une concernant le champ religieux du Roi, et l’autre sur son rôle de chef de l’état.

La symbolique de la séparation est notamment inscrite dans le fait que tous les dahirs relevant du Roi doivent être contre-signés par le Chef du gouvernement, à l’exception de quelques cas bien précis.

La désignation des hauts responsables de l’état par le Chef de gouvernement, le rattachement des ministères de l’intérieur et de la justice au gouvernement sont aussi des changements majeurs qui donnent plus de crédibilité à la séparation des pouvoirs.

La volonté d’inscrire la bonne gouvernance dans cette Constitution et dans la gestion du pays ressort nettement de tous les conseils et institutions qui ont été inscrits dans ce texte fondamental:

- Conseil national des langues et de la culture marocaine

- La régionalisation

- Organe de défense des égalités et de lutte contre les discriminations

- Conseil consultatif de la famille et de l’enfant

- Le conseil économique social et environnemental

- Conseil National des droits de l’Homme

- Le médiateur

- Conseil des MRE

- Conseil supérieur de l’audiovisuel

- Conseil de la concurrence

- Conseil de la prévention contre la corruption

- Conseil supérieur pour l’éducation la formation et la recherche scientifique

- Conseil pour la jeunesse et le travail associatif

L'application effective de toutes ces dispositions va demander beaucoup de textes et lois organiques. Tout devrait être promulgué d'ici 5 ans. Ce sera certainement le principal chantier du prochain gouvernement.


Source : www.aufaitmaroc.com

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